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Association Amicale des Anciens d'Alcatel Space
CHRONIQUES D'UN MÉTIER de 1963 à 1993
Table | Préf | Intro | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9

6 - Les programmes de satellites

6.5 - Les stations de contrôle


Chaque satellite ou autre véhicule spatial ne peut être exploité sans être en liaison avec des moyens terrestres chargés de le localiser, de lui adresser des ordres de télécommande et de recevoir les signaux de télémesures qu'il émet pour rendre compte de l'activité de ses différents organes (servitudes de bord ou capteurs scientifiques). Ces fonctions sont remplies par des stations dites de contrôle qui peuvent en assurer chacune l'ensemble ou, au contraire, être spécialisées dans l'une ou l'autre d'entre elles. Selon la terminologie habituelle, ces stations font partie du «segment spatial» par opposition, par exemple, aux stations terriennes de télécommunications qui font partie, par définition, du «segment terrien».

Dès sa création, le CNES entreprend de s'équiper de moyens de contrôle pour ses futurs satellites et lance, dès 1963, deux appels d'offres pour les fournitures respectives de stations de localisation de satellites et de stations d'émission des signaux de télécommande et de réception des télémesures.

Les péripéties de l'attribution de chacun des deux marchés à l'une ou l'autre des deux sociétés, alors concurrentes, Thomson-Houston et CSF sont relatées dans les chapitres consacrés à leurs débuts respectifs dans le domaine de l'espace.

Finalement, Thomson gagne le marché des stations de localisation Diane, et CSF celui des stations de télécommande et de télémesures Iris.
 

Les stations Diane


Le CNES passe commande de deux stations de localisation de satellites à défilement par interférométrie. Les mesures interférométriques sont effectuées sur une raie émise par le satellite dans la bande des signaux de télémesures de 136 à 138 MHz. Le marché est notifié en 1964 à la Division RTT de Thomson, installée à Gennevilliers, qui assure la maîtrise d'oeuvre et fournit la plus grande partie de l'électronique. Ses principaux sous-traitants sont STAREC, qui fournit les antennes, et Câbles de Lyon, qui fournit le réseau de câbles reliant les équipements de réception aux antennes.

Les stations sont installées en 1965, l'une à Pretoria en Afrique du Sud et l'autre à Hammaguir au Sahara. Cette dernière sera transférée à Kourou en 1968. Après leur étalonnage par photographies sur fond d'étoiles d'un émetteur aéroporté, elles seront maintenues opérationnelles pendant une vingtaine d'années. Une troisième station sera vendue à l'ESRO et installée en 1967 à Redu (Belgique).

Sur le plan technique, quelques points remarquables méritent d'être signalés :

- la grande résolution des mesures angulaires effectuées par deux bases de quatre antennes chacune disposées sur deux axes rectangulaires (nord-sud et est-ouest). La levée d'ambiguïté est obtenue au moyen d'un autre système de petites antennes. Le champ d'antennes occupe une superficie d'environ un hectare. Toutes sont fixes, les grandes étant du type à fente et donc particulièrement robustes et d'une grande simplicité de réalisation, permettant à la proposition de Thomson d'offrir un prix très compétitif par rapport aux antennes proposées par le concurrent CSF qui sont du type hélicoïdal et qui, malgré une conception technique remarquable, conduisent certainement à des prix de fabrication plus élevés ;

- des câbles coaxiaux à diélectrique air de fort diamètre pour réduire l'affaiblissement relient le champ d'antennes à la station ;

- les récepteurs à faible facteur de bruit et à commande automatique de phase équipés de transistors ;

- la résolution très fine (1/1000 tour) des phasemètres utilisés pour les mesures ;

- la numérisation des résultats des mesures extraits en station avant leur transmission par Télex vers la métropole.
 

Les stations Iris


Le marché pour la réalisation de six stations de réception des signaux de télémesures et d'émission des signaux de télécommande est notifié à CSF en 1964. 

Le maître d'oeuvre est le Groupement d'études spatiales (GES) installé à Corbeville. Les réalisations industrielles sont effectuées dans les établissements de Levallois et de Sartrouville. Le principal sous-traitant est Elecma pour les antennes.

Six stations sont fabriquées, dont deux intégrées en conteneurs transportables. Elles sont installées en Afrique et dans les régions méditerranéennes.

Les points qui méritent d'être signalés sur le plan technique sont :

- les récepteurs à faible facteur de bruit, à commande automatique de phase, équipés de transistors ;

- une fonction télémétrie exploitant l'effet Doppler et mise en oeuvre au moyen d'un compteur du commerce modifié.
 

Les activités sol après Diane et Iris


Dans le chapitre consacré aux débuts des activités spatiales à Gennevilliers, certaines réalisations de matériels de contrôle au sol sont mentionnées. Elles sont brièvement rappelées ci dessous :

- un système de réception de télémesures PFM pour les satellites Diamant ;

- un système de réception de télémesures PCM pour les familles de satellites suivantes ;

- un système de distribution du temps pour le centre spatial de Kourou ainsi que pour l'ESRO. 
 
 

De 1967 à 1982, ni la Division MAS ni les Départements ESA et DSP ne se voient attribuer de responsabilités dans le domaine des stations de contrôle. Leurs moyens industriels et leur personnel technique sont spécialisés dans le domaine des matériels embarqués, dont la réalisation met en oeuvre un état d'esprit et des procédures très mal adaptés à la conception et à la production de matériels sol dans des conditions économiques. Pendant une quinzaine d'années, la taille relativement réduite des unités successives chargées des activités de satellites ne permettra pas d'y adjoindre de moyens spécifiques des activités sol, dont la charge de travail serait par trop aléatoire.

Durant cette période, diverses unités de Thomson CSF réalisent un certain nombre de matériels destinés au contrôle des satellites ou de leur lancement et dont les techniques et les technologies font partie de leur domaine habituel d'activité. On peut citer :

- jusqu'en 1970 les radars de trajectographie Aquitaine puis Bretagne réalisés à Bagneux par la Division Radars de Surface de Thomson et installés sur la base de Kourou ;

- en 1968, la Division Faisceaux Hertziens de Thomson-CSF installée à Levallois fournit des faisceaux hertziens et des équipements de réception de télémesures ;

- en 1973, le GIE Telspace, dont Thomson-CSF et la CGE sont membres, fournit la station de contrôle pour satellite géostationnaire du programme Symphonie.
 

Les stations d'Eutelsat II


À partir du milieu des années quatre-vingt, Alcatel Espace (ATES) atteint une taille suffisante pour pouvoir, sans risques excessifs, diversifier en partie ses activités vers le domaine des stations de contrôle, y compris les maîtrises d'oeuvre. C'est un moyen supplémentaire d'utiliser, avec des investissements raisonnables, des personnels et des moyens techniques disponibles, contribuant à la régulation des plans de charge et améliorant la connaissance des systèmes complets.

À partir de 1987, ATES participe largement à la réalisation des deux stations développées spécifiquement par l'organisation Eutelsat pour la surveillance et le maintien à poste des satellites géostationnaires de deuxième génération Eutelsat II. Ces stations assurent les liaisons de télémesure, télécommande et télémétrie avec les satellites en orbite pour le compte du centre de contrôle installé à Paris. Elles seront implantées à Rambouillet et à Sintra (Portugal).

Sous la maîtrise d'oeuvre de Logica (Grande-Bretagne), ATES est responsable du sous-système en bande de base alors que Telspace, filiale d'Alcatel Faisceaux Hertziens, est responsable du sous-système hyperfréquences. L'un et l'autre font l'objet de marchés séparés avec le client. Étant déjà présent dans la composante spatiale du système, ATES apporte une garantie de bonne compatibilité.

Le contrat est signé le 15 avril 1987. Les fonctions de chef de projet sont remplies à ATES par Noël Thébault. La réception des installations sur le site est prononcée le 31 mars 1989.

La conception modulaire de l'architecture favorise l'extension jusqu'à six satellites de la configuration prévue initialement pour trois. En outre, cette conception facilite la maintenance et l'exploitation opérationnelle.

Deux chaînes de télécommande assurent la réception des messages émis par le centre de contrôle, le contrôle de leur validité, leur transmission vers la partie émission de la station et la génération d'un compte-rendu.

Trois chaînes de réception exécutent la démodulation et la synchronisation des messages de télémesure venant des satellites et leur transfert vers le centre de contrôle, avec une visualisation locale de certains paramètres.

La chaîne de télémétrie comprend un modulateur, un récepteur, un générateur-extracteur de tons et un dispositif d'appréciation d'intervalle et de contrôle.

Une unité de distribution du temps effectue la datation des événements.

Une unité de télégestion assure le contrôle de la configuration des équipements et leur surveillance.

Les informations entre sites sont transmises sur le réseau X25.
 

La station de contrôle des Kerguelen

Baies de la station des Kerguelen

Cette station de suivi des satellites opère en bande S (2 GHz) et complète le réseau spécifique du CNES, après les stations de Kourou, Pretoria et Toulouse-Aussaguel. Ce réseau est particulièrement bien adapté aux satellites lancés depuis Kourou ou les centres de lancement indien et japonais, ainsi qu'aux satellites à défilement d'observation de la Terre placés en orbite polaire. L'exploitation de la station est prévue en mode «local» ou «distant», à partir du centre d'opérations du CNES, par l'intermédiaire d'une liaison à 128 kbits/s.

Le marché de maîtrise d'oeuvre est signé en 1989 avec ATES qui s'assure le concours d'une vingtaine d'industriels européens. Bernard Wagner est désigné comme chef de projet. La station est recettée sur le site des Kerguelen le 5 mai 1995. Suivant les dispositions contractuelles, elle demeure la propriété d'ATES pendant cinq ans. L'exploitation en est assurée par Cegelec pour une mission nominale de six passages de satellites par jour pendant dix ans.

Station Kerguelen sous le radôme de CandieL'environnement particulièrement hostile et le caractère aléatoire de l'accès au site (liaison maritime uniquement) imposent des conditions particulières :

- grande sûreté de fonctionnement, c'est-à-dire fiabilité, sécurité, disponibilité, maintenabilité. La disponibilité opérationnelle de la station est supérieure à 98 % en totale autonomie entre deux rotations de navires ;

- une intégration complète du système et une série d'essais sont réalisées à Toulouse avant démontage et expédition par voie maritime.
 
 

Les principaux sous-systèmes comprennent :

- le radôme de protection de 15 mètres de diamètre, composé de 120 panneaux de polyuréthane et verre époxy ;

- l'antenne principale du type Cassegrain à réflecteur parabolique de 10 mètres de diamètre, pilotable suivant différents modes ;

- l'antenne de désignation d'objectif, de 1 mètre de diamètre, qui assiste l'antenne principale pour la recherche et les passages du satellite au zénith ;

- une chaîne de réception de synchronisation primaire et secondaire et de datation des télémesures ;

- un amplificateur de puissance de 1 kilowatt à l'état solide composé de 20 modules élémentaires de 60 watts en autoredondance ;

- une unité de traitement et de stockage des informations après correction des données de localisation en fonction du calibrage et des erreurs de propagation troposphériques ;

- une horloge atomique au césium.
 
 

Les premiers satellites utilisateurs de la station sont Helios et Cerise.
 

Les stations de contrôle de Turksat


Le programme Turksat où ATES fournit «clés en main» un système complet de télécommunications par satellites comprend, entre autres, la livraison, l'installation et la mise en service de deux stations de contrôle. Les détails correspondants sont donnés dans le chapitre consacré à l'ensemble de ce programme.

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