Accueil du siteRubrique histoire
Association Amicale des Anciens d'Alcatel Space
CHRONIQUES D'UN MÉTIER de 1963 à 1993
Table | Préf | Intro | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9

4 - Les fonctions et les métiers

4.6 - L'intégration et les essais

La télémesure-télécommande


Les activités d'intégration dans le domaine des satellites commencent à Thomson-CSF lorsque le Service NF, à Gennevilliers, se voit confier par l'ESRO la maîtrise d'oeuvre du sous-système télémesure-télécommande du satellite HEOS A1. À l'exception du codeur de télémesure qui a été sous-traité à la SAT, tous les autres équipements du sous-système sont réalisés à Gennevilliers.

L'intégration du sous-système et ses essais d'ensemble sont effectués par le Service NF, dirigé par Roland Gosmand, sous la responsabilité du chef de projet Jean-Paul Sigwald. C'est la même équipe qui, transférée à Vélizy dans la Division MAS, effectuera l'intégration d'un sous-système identique destiné au satellite HEOS A2.

Ces travaux, réalisés sur un petit sous-système, ne nécessitent que des moyens de mesure conventionnels sans qu'il soit nécessaire à cette époque de rechercher l'automatisation.

Par la suite, le même type de travaux d'intégration sera effectué pour les sous-systèmes TMTC de Symphonie A et B en 1972-73, GEOS 1 et 2 en 1974, ISEE B en 1976, ISPM/Ulysses en 1982-83 et Giotto en 1984.

Dialogue

En 1975, le programme Dialogue, malheureusement interrompu pour des raisons budgétaires, va jusqu'à l'intégration du modèle d'identification de la charge utile, dont la mission doit consister à localiser avec précision des balises placées au sol. Cette intégration de matériels entièrement nouveaux a un aspect «mise au point» plus marqué que dans les autres programmes. Elle renforce l'attention que l'on doit porter aux interfaces entre les équipements.
 

Les charges utiles et les satellites de télécommunications et d'observation


La participation du Département ESA à des intégrations commence dans ce domaine à l'occasion des programmes Intelsat IV et Symphonie.

Pour Intelsat IV, dont le déroulement est décrit dans un chapitre particulier, quatre ingénieurs sont détachés pendant plusieurs mois chez Hughes Aircraft à El Segundo (Californie) pour participer à la mise au point des bancs d'essais, ainsi qu'à l'intégration et aux essais des premiers satellites du programme. Ces ingénieurs sont Georges Blondin, Jean-Marie Fourquet, Gilles Griffon du Bellay et Jean-Claude Héraud.

Pour Symphonie, la participation du Département à l'intégration se situe à deux niveaux :

- l'intégration et les essais des sous-systèmes répéteurs de télécommunications, auxquels participent également des représentants de la Division Faisceaux Hertziens ;

- l'intégration et les essais des satellites.
 
 

Cette activité dure de 1969 à 1975 et porte sur quatre modèles de satellites : le MI (modèle d'identification), le MQ (modèle de qualification) et les deux modèles de vol (MV1 et MV2).

La charge utile est placée sous la responsabilité de Siemens. Les répéteurs sont préintégrés sur de fausses structures. Ces opérations sont effectuées par Siemens pour le MI et le MV1, et par Thomson-CSF pour le MQ et le MV2. Les matériels d'essais correspondants ont été conçus et réalisés par Siemens.

Les satellites complets sont intégrés par une équipe formée de représentants de chacune des sociétés membres du CIFAS : Aérospatiale, SAT, Thomson-CSF, AEG-Telefunken, MBB et Siemens.

Ces travaux sont effectués par la même équipe, successivement aux Mureaux, établissement de l'Aérospatiale, pour les MI, MQ et MV1, puis à Ottobrunn, établissement de MBB, pour le MV2.

Les représentants du Département ESA de Thomson-CSF dans cette équipe, parmi lesquels se trouve Philippe Gsell, futur chef du Service Intégration d'Alcatel Espace, y ont une part importante :

- responsabilité de toute l'intégration électrique et des essais de compatibilité électrique au niveau du satellite ;

- participation aux essais d'environnement du satellite.
 
 

Ils participent ensuite aux campagnes de lancement au centre spatial Kennedy (quatre mois par satellite) et aux travaux de mise à poste.

Avant l'intégration proprement dite des satellites, la Division Travaux Extérieurs de Thomson-CSF a effectué l'intégration et les essais des moyens de contrôle et de mesure de tous les sous-systèmes des satellites. Ces moyens sont rassemblés dans deux remorques de tests qui suivent les satellites au cours de leurs essais dans divers centres : Les Mureaux, Intespace à Toulouse, Ottobrunn, IABG à Münich, et le centre spatial Kennedy aux États-Unis.

Le programme Aerosat, bien qu'il n'ait finalement pas lieu, fournit au Département DSP, en 1975 et 1976, une excellente occasion de s'initier à la maîtrise d'oeuvre de la charge utile complète d'un satellite de télécommunications et à son intégration. La proposition Aerosat donne l'occasion, par exemple, à Jean-Claude Héraud, formé dans Intelsat IV, et à Philippe Gsell, formé dans Symphonie, de tirer profit de l'expérience acquise dans ces deux programmes. Cette affaire est une amorce de ce qui se passera par la suite, cinq ans plus tard. Si elle se concrétisait, elle donnerait lieu à la mise en place de gros moyens en locaux et en bancs de tests. Pour la première fois, la proposition porte sur le développement de moyens de tests volumineux, sophistiqués et automatisés, dont la conception est effectuée sous l'impulsion et avec l'aide du maître d'oeuvre du satellite : RCA-Astro Electronics. La définition de ces moyens servira de base pour les projets suivants en télécommunications.

Le programme TDRSS, bien que ne comportant pas de travaux d'intégration, marque une date importante dans l'évolution des moyens de tests au Département DSP.

La commande passée en 1977 par le client TRW porte sur soixante récepteurs en bande Ku, à livrer entre septembre 1978 et septembre 1980. Pour tenir ces délais, il est hors de question d'en rester aux réglages et essais effectués manuellement en utilisant des appareils de mesure conventionnels. Une série de mesures de recette effectuée manuellement sur l'un des premiers récepteurs dure un mois, alors que, par la suite, l'utilisation d'un banc de tests automatique permettra d'abaisser cette durée à une semaine. De plus, sur chaque récepteur, une recette comporte plusieurs séries de mesures complètes : les mesures initiales et finales entre lesquelles s'insèrent des essais en environnement (vibrations, température), pendant lesquels les paramètres fonctionnels doivent être vérifiés.
 

Le bâtiment d'intégration, des moyens d'essais d'environnement, et des antennes à Candie.

Outre le gain de temps, l'utilisation de bancs de tests automatiques amène un certain nombre d'autres avantages, par exemple :

- des instruments inamovibles interconnectés définitivement garantissent une bonne fidélité des mesures ;

- un montage fixe assure une tenue dans le temps plus longue des calibrages ;

- un calculateur permet des mesures répétitives et la détection des points de mesure aberrants ;

- la commande à la vitesse électronique des réglages et des opérations effectués par les instruments permet une grande rapidité d'exécution et évite aussi d'être «piégé» par des phénomènes de dérives aléatoires ;

- branchements et connexions guidés et imposés conduisent à moins d'erreurs humaines ;

- la rapidité des mesures et des traitements de données pour aboutir à une présentation très nette des résultats ne peut se faire que grâce aux calculateurs qui assurent aussi un archivage, tant des données que des configurations de mesures matérielles et logicielles.
 
 

Un jeune ingénieur, déjà formé en informatique, Jean-Claude Lestriez, est chargé de la conception, de la mise au point, et ensuite de l'exploitation de ces premiers bancs de tests automatiques, qui sont les précurseurs d'une longue lignée de plus en plus complexe, et dont il restera le responsable pendant de nombreuses années.

L'apparition sur le marché d'appareils de mesure programmables et de systèmes informatiques pour en réaliser la programmation de façon simple permettra à cette entreprise d'aboutir dans de bonnes conditions.

Contrôlé par un modeste calculateur dont la mémoire centrale est de 16 kilooctets (on est en 1977), chacun des deux bancs identiques fonctionne jour et nuit (en particulier pendant les essais thermiques) pendant deux ans pour les réglages et les mesures de performances des équipements. Le fait qu'ils permettent de tenir les délais contractuels avec un mois d'avance contribuera sans aucun doute à l'attribution à DSP, par le client TRW, du prix du meilleur fournisseur (best supplier award) en 1980.
 

Telecom 1 et la suite


Quelques années plus tard arrivent des affaires comme Telecom 1, SPOT 1 et TDF 1 où DSP, puis Alcatel Espace, a des responsabilités de sous-ensembles importants de satellites, de leur intégration et de leurs tests. Il devient nécessaire pour DSP de :

- se doter de moyens en locaux adéquats pour des activités de cette dimension ;

- se structurer et se former dans ce type d'activité pour être capable d'effectuer les tâches suivantes :

- assemblage et manutention de grosses structures (modules de communications, simulations de plates-formes, conteneurs…),

- définition et réalisation de moyens de mesures (bancs de tests, simulation des interfaces plate-forme),

- mesures sur la charge utile isolée,

- mesures sur la charge utile intégrée à la plate-forme,

- mesures en essais d'environnement satellite,

- suivi de qualité spécifique et contrôles,

- stockage de matériels,

- mesures en campagne de lancement,

- transports particuliers.
 
 

Un Service «Intégration» est créé en 1982 sous la direction de Philippe Gsell. Ce Service réunit les équipes d'intégration de Telecom 1 (Jean-Claude Lestriez), TDF 1 (Marcel Barré), et SPOT 1 (Jean-Yves Legal).

Dans un premier temps, le problème des locaux donne lieu à des solutions de dépannage. Les MI de la charge utile de Telecom 1 et de l'ensemble TMCU (télémesure charge utile) de SPOT 1 sont intégrés aux Mureaux dans l'ancien local d'intégration de Symphonie, qui appartient à l'Aérospatiale et qui est loué pendant environ un an. Ensuite, le BIS (Bâtiment d'Intégration Satellite) du CNES, à Toulouse, est loué pendant environ dix-huit mois. On y intègre le MI de la charge utile de TDF 1 et on y commence l'intégration des modèles de vol de Telecom 1 et de SPOT.

À partir du début de 1984, les nouveaux locaux d'intégration construits à Toulouse-Candie dans le bâtiment D sont mis en service. Ils seront aménagés progressivement et comprennent :

- une salle blanche d'intégration (propreté de classe 100 000) de 800 mètres carrés avec un sas de décontamination de 200 mètres carrés et des ponts roulants de 5 tonnes (température stabilisée à 21 °C, humidité relative de 50 à 60 %, pression relative de 0,1 à 0,3 millibar) ;

- cinq salles de contrôle pour les moyens d'essais (bancs, magasins de stockage des équipements de vol, salle informatique…) ;

- une chambre anéchoïque pour les essais de compatibilité électromagnétique ;

- une chambre thermique de 50 mètres cubes permettant des essais de - 15 °C à + 60 °C en pression ambiante ;

- un atelier d'intégration de baies de tests (montage mécanique, câblage) ;

- un atelier de réalisations mécaniques légères ;

- un atelier de plasturgie.

 À l'extrémité du bâtiment se trouve le monte-charge d'accès au radôme de la base d'essais d'antennes, sous lequel les charges utiles peuvent être testées en rayonnement, dans des conditions de propreté identiques à celles de la salle d'intégration.
 
 

Le bâtiment d'intégration, des moyens d'essais d'environnement, et des antennes à Candie.

La salle d'intégration de Candie en pleine activité (ci-dessous).

La salle d’intégration de Candie en pleine activité
Les grandes dimensions, en particulier la hauteur, que les responsables de DSP ont spécifiées pour la salle d'intégration et son sas d'entrée donnent lieu à des critiques de la part de quelques profanes, y compris à certains échelons directoriaux. Les critères qui ont conduit à ce choix sont simplement la possibilité de manipuler des structures de satellites de la taille d'Intelsat VI (référence de l'époque), de les introduire dans leurs conteneurs ou de les en extraire, le tout en atmosphère propre. Il faut se souvenir qu'au moment où le projet de salle d'intégration est établi, en 1981, la proposition pour Intelsat VI est en cours de préparation avec Hughes Aircraft, et l'une des hypothèses envisagées pour accroître la probabilité d'un vote français en faveur de la proposition de Hughes est analogue à celle déjà envisagée pour Intelsat IV, c'est-à-dire l'intégration par DSP, à Toulouse, d'au moins un des modèles de vol du programme. Pour Intelsat IV, ce «privilège» avait été finalement attribué à British Aircraft.

La nouvelle salle voit se terminer les intégrations des charges utiles de Telecom 1 et de SPOT 1. Suivent celles de TDF 1 et TDF 2.

De 1984 à 1987, une importante baisse des charges industrielles, accompagnée d'un plan social, voit se réduire l'activité de la salle d'intégration. On y intégrera cependant les TMCU de SPOT 2 et de SPOT 3, l'ensemble expérimental d'IOC et les répéteurs de Tele X.

La reprise d'activité se fait vers la fin de 1987 avec Telecom 2 et Topex-Poséidon. On en arrive alors à une équipe composée d'un ingénieur et d'un agent technique par console informatique de commande d'un banc s'adressant à une charge utile.

À partir d'Intelsat VII, dont le maître d'oeuvre est Ford Aerospace (devenu par la suite Space Systems/LORAL), une nouvelle ère débute à Alcatel Espace. Là aussi, le Service Intégration participe à la proposition à Palo Alto (Jean-Claude Lestriez et Michel Fournier) et effectue à Toulouse, de 1988 à 1994, l'intégration des dix-huit panneaux de 2,40 mètres de côté constituant la partie essentielle des neuf modèles de vol de la charge utile. On sent poindre un effet de série mais il s'agit de la fin de l'époque de l'artisanat d'art. Chaque panneau possède ses caractéristiques propres, mais mesures, prédictions et moyens de tests, outillages et procédures ont été conçus pour toute la série.

C'est à partir de 1995 que le programme Globalstar (cinquante-six modèles de vol) voit se réaliser des intégrations en série.
 
 

Le tableau ci-après résume les travaux d'intégration effectués à partir de 1970 :
 

Programme
Période approximative
Responsabilités Alcatel Espace
Symphonie A et B 
Satellite germano-français de télécommunications
1970 à 1974
Pré-intégration des charges utiles ; participation à l'intégration satellite et à la campagne de lancement
Intelsat IV
Satellite international de télécommunications
1972
Participation à l'intégration satellite
Telecom 1 A, B et C 
Satellite français de télécommunications
1981 à 1985
Intégration des charges utiles ; participation à l'intégration satellite et à la campagne de lancement
SPOT 1 et 2 
Satellite français d'observation de la Terre
1981 à 1986
Intégration de l'électronique de la charge utile ; support à l'intégration satellite et à la campagne de lancement
TDF 1 et 2 
Satellite français de télévision directe
1981 à 1985
Intégration de la charge utile
Tele X
Satellite suédois de télécommunications et de télévision directe
1985 à 1988
Intégration de la charge utile participation à l'intégration satellite et à la campagne de lancement
ISPM/Ulysses
Satellite scientifique
1977 à 1979
Intégration du sous-système de télémesure et télécommande
Giotto
Sonde d'observation de la comète de Halley
1984
Intégration du sous-système de télémesure et télécommande ; participation à la campagne de lancement
SPOT
Satellite français d'observation de la Terre
1989 à 1991
Intégration de l'électronique de la charge utile ; support à l'intégration satellite et à la campagne de lancement
Viking
Satellite suédois
1981
Participation à l'intégration du sous-système de télémesure et télécommande
IOC
Expérience européenne de communications interorbites
1987 à 1992
Intégration de l'électronique de la charge utile support à l'intégration satellite et aux mesures en orbite, mesures après récupération de l'expérience
ERS
Satellite européen d'observation de la Terre
1987
Intégration des sous-systèmes charge utile
Poséidon
Expérience française d'océanographie
1987 à 1989
Intégration de l'instrument altimètre-radar
Telecom 2 (4 modèles de vol) Satellite français de télécommunications
1987 à 1996
Intégration des charges utiles ; participation à l'intégration satellite et à la campagne de lancement
Intelsat VII et VII A (9 modèles de vol) 
Satellite international de télécommunications
1988 à 1994
Intégration des charges utiles participation à l'intégration satellite et à la campagne de lancement
Turksat (3 modèles de vol) 
Satellite international de télécommunications
1994 à 1996
Intégration des charges utiles participation à l'intégration satellite et à la campagne de lancement
SPOT
Satellite français d'observation de la Terre
1988 à 1995
Intégration de l'électronique de la charge utile ; support à l'intégration satellite et à la campagne de lancement
Helios 1 (2 modèles de vol) 
Satellite français d'observation de la Terre
1988 à 1995
Intégration de l'électronique de télémesure
Orion
Satellite international de télécommunications
1995
Mesures sur base d'antennes des performances satellites
Cerise
Microsatellite français d'observation de la Terre
1994 à 1996
Intégration du satellite ; participation à la campagne de lancement, à l'exploitation en orbite
Arabsat II (2 modèles de vol)
Satellite international de télécommunications
1996
Intégration des charges utiles participation à l'intégration satellite et à la campagne de lancement
Artemis
Satellite européen de communications interorbites
1995 à 1997
Intégration d'une charge utile
Mabuhay (2 modèles de vol) 
Satellite international de télécommunications
1996
Intégration des charges utiles ; participation à l'intégration satellite et à la campagne de lancement
Asar (Envisat)
Satellite européen d'observation de la Terre
1994 à 1997
Intégration des éléments de l'antenne à ouverture synthétique
Globalstar(56 modèles de vol) 
Satellite de télécommunications avec les mobiles
1995 à 1997
Intégration des charges utiles participation à l'intégration satellite et à la campagne de lancement

L'évolution des bancs d'essais Telecom 1


Après l'utilisation, pour TDRSS, du premier banc de tests piloté par calculateur, mais destiné à un seul récepteur, et le projet «papier», écrit pour Aerosat, des bancs de tests destinés à une charge utile complète, la mise en oeuvre concrète de l'expérience acquise se fait dans le programme Telecom 1.

Aux aspects de puissance près, les diverses caractéristiques à mesurer dans une charge utile se rapprochent beaucoup de celles d'un récepteur. Pour passer de TDRSS à Telecom 1, l'analyse des moyens de mesure nécessaires ne demande qu'une extrapolation relativement évidente.

Cependant, la charge utile ne fonctionnant qu'assemblée avec le module de service, il faut réaliser un simulateur de cette partie du satellite qui vient s'adjoindre à l'ensemble de mesures des caractéristiques de la charge utile. Ce simulateur doit également fournir des renseignements sur l'état des équipements qui composent la charge utile. Un synoptique animé par les télémesures fournies par la charge utile vient donc compléter les bancs.

La charge utile de Telecom 1 comprenant trois ensembles de répéteurs fonctionnant dans trois bandes de fréquences différentes, on pourrait utiliser simultanément et en parallèle trois bancs d'essais, mais pour limiter le coût des investissements, il est décidé de tester les ensembles de répéteurs en série avec un seul banc.

La cohérence des données entre les mesures au niveau équipement et au niveau charge utile suggère de déduire les bancs de recette des équipements fabriqués par Alcatel Espace de la base «charge utile», par simplification ou suppression de certains instruments. Les logiciels restent basés sur les mêmes principes.
 
 

La génération logicielle suivante : Telecom 2 (1987)


Pour Telecom 2, les besoins augmentent nettement : trois charges utiles par satellite, charges utiles plus importantes, quatre modèles de vol à livrer. Il faut donc passer aux mesures en parallèle avec plusieurs bancs fonctionnant ensemble, mais avec un seul simulateur de module de service.

L'avancée générale dans le domaine logiciel invitera à développer un ensemble de logiciels avec bases de données, écrans graphiques interactifs (synoptiques), structure d'accueil et IHM (interface homme-machine), dont les systèmes de micro-ordinateurs donnent une idée à l'époque actuelle. Salomé, tel est le nom donné à cette Structure d'accueil pour logiciel de mesure.

L'écran interactif permet à l'opérateur de contrôler les charges utiles en cours d'essais, sans encombrer sa mémoire de la liste des commandes et télémesures (qui fournissent l'état des équipements) : la station de travail s'en charge à partir des informations dont elle dispose et de la localisation des «clics» de la souris sur l'écran.

Les programmes de mesure ne sont plus qu'une partie du système informatique qui gère les bancs. La taille et la complexité des logiciels supportant l'interface homme-machine conviviale exigent un matériel informatique performant.

Cette génération de bancs de mesures hyperfréquences de télécommunications est celle qui est utilisée actuellement pour toutes les charges utiles transparentes depuis Telecom 2, Intelsat 7, Turksat, jusqu'à Arabsat II. De plus, le logiciel, dont la première version est baptisée ISYS : structure d'accueil (IHM), est réutilisable pour des programmes scientifiques (SPOT 4).
 

La génération «mesures rapides» (1992) : Intelsat VII/VII A


Les satellites devenant de plus en plus complexes et comportant de plus en plus de canaux (trente-six canaux pour Intelsat VII, cinquante-quatre canaux pour Mabuhay), les techniques de mesure dites «classiques» ou «pas à pas» ne sont plus adaptées aux délais de livraison imposés par les clients. Il faut dont mettre en oeuvre des techniques de mesure dites «rapides» ou «balayées» qui permettent de diviser par dix le temps d'essai.

En même temps que la réduction du temps d'intégration et d'essais, il est nécessaire de mettre en place des outils d'analyse des résultats de mesures pour accélérer le passage d'une phase de test à la suivante. C'est chose faite grâce à l'apparition des réseaux (locaux et internationaux) et de produits de bureautique conviviaux. Par conséquent, il devient possible de présenter en temps réel ces résultats de test aux différents acteurs de l'entreprise et aux clients.
 

La dernière génération (1995) : Globalstar


Cette fois, l'avancée vient d'un nouveau type d'instruments de mesure qui simulent de beaucoup plus près les fonctionnements nouveaux des charges utiles (nombreux canaux de faible largeur…), grâce à l'inclusion des microprocesseurs dans les instruments de mesure. Ceux-ci deviennent des calculateurs de construction ou de synthèse des données, d'un signal, ou à l'inverse d'analyse des signaux, auxquels, à l'interface avec l'extérieur, on adjoint une «tête» analogique adaptée aux fréquences auxquelles on travaille. Tout se numérise, la technologie étant celle des micro-ordinateurs.

Au lieu d'utiliser des mesures rapides «balayées», on met au point des mesures «multitons» qui chargent la charge utile de la même façon que le feraient les utilisateurs avec leur téléphone cellulaire. Ces techniques permettent de réduire encore davantage le temps de mesure et un facteur 10 supplémentaire est gagné.

Cette diminution substantielle du temps de mesure est particulièrement bienvenue sur ces satellites défilants (ou en orbite basse), car la quantité de modèles à assembler et tester est sans commune mesure avec les satellites de communications classiques. Dans le cas de Globalstar, on doit fabriquer cinquante-huit satellites avec un rythme de production de trois par mois (à comparer aux trois modèles produits auparavant avec un rythme de un satellite tous les trois mois). Les logiciels ne sont adaptés que dans leur aspect «mesure» et «traitement des résultats».

Les programmes de mesure évoluent ainsi : ils ne traduisent plus, dans leur trame, la procédure de mesure qui aurait été suivie si cette dernière avait été «manuelle». Grosso modo, ils consistent à fournir un fichier de données à l'instrument construisant les signaux envoyés à la charge utile, et le traitement des résultats analyse le fichier de données rendu par l'instrument branché en sortie.

Pour conclure, on remarque que chaque génération de banc naît avec une avancée technique :

- apparition des calculateurs en 1977 ; ils permettent de programmer des instruments de mesure classiques ;

- les instruments sont équipés de cartes qui les rendent intrinsèquement programmables en 1982, et les calculateurs disposent du système et d'un langage Basic d'une simplicité irremplaçable qui donne au technicien les moyens de programmer sa mesure ;

- en 1987, les systèmes logiciels informatiques s'équipent d'outils graphiques, d'interfaces conviviales, etc. L'informatique est le domaine ayant fait le plus grand bond en avant ; elle offre beaucoup de possibilités mais complique son utilisation ;

- en 1995 se produit l'insertion de microprocesseurs dans les instruments. Le règne du tout-numérique commence ; charge utile et bancs ne sont plus transparents, la mesure se circonscrit autour du contrôle du taux d'erreur des équipements.

Equipe d'intégration de Telecom 2

Quelle que soit la durée d'un projet (en 1982, un planning de réalisation dure trente-six mois, en 1996, une charge utile de télécommunications récurrente est livrée en quatorze mois), les pénalités sur le report d'une date de lancement sont tellement fortes que cette dernière reste intangible. Par contre, tout au long du développement et de la réalisation du satellite, de l'étude, des équipements à l'intégration de la charge utile, les occasions ne manquent pas d'accumuler les retards. C'est ainsi que, la date du lancement n'étant pas modifiée, et la durée de l'AIT satellite par le maître d'oeuvre restant intouchable, les équipes du Département Intégration d'Alcatel Espace sont régulièrement mises à contribution pour rattraper le retard pris en amont.

Parce qu'ils sont appelés, en catastrophe, sur le pas de tir, pour changer un équipement défaillant au dernier moment, parce qu'ils sont appelés à travailler en double voire triple équipe lors des essais en vide thermique du satellite chez son maître d'oeuvre, parce que, par conséquent, ils ne peuvent, dans ces conditions, respecter un horaire de travail classique, enfin parce que leur travail a une densité variable, les hommes qui font ces succès d'intégration ont une vie particulièrement agitée.

De telles prouesses techniques ne sont possibles que grâce à une très profonde motivation. Il est vrai que participer à l'intégration de la charge utile puis du satellite, pendant plusieurs mois, est peut-être plus enthousiasmant que de s'arrêter à une carte électronique sans en chercher la finalité. Au dernier instant, un point culminant presque sacré se ressent lors du décompte final, lors du «largage crochets», lors de l'»éjection satellite», et enfin, mais bien plus tard, lorsque le satellite est déclaré opérationnel.

Début de cette page

All rights reserved © Copyright 1999-2004 Alcatel Space, Paris, France.